Navigation délicate, le passage d'un raz

Raz de Sein et ses courants violents © Ronan Follic

Naviguer en Atlantique ou en Manche exige de composer avec le courant de marée. Certains passages comme le raz Blanchard ou le raz de Sein concentrent le courant de marée. En navigant dans les raz, même par beau temps, l'état de la mer sera considérablement modifié et quelques précautions s'imposent.

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Les raz en France

Un raz, c'est un passage relativement étroit où le courant marin est violent.

Le raz de Barfleur est situé à la pointe nord-est du Cotentin. Le puissant flot et jusant occasionnent parfois une mer difficile même par beau temps.

Phare de Gatteville qui balise le raz Barfleur

Le Raz Blanchard (l'extrémité sud-ouest du Cotentin) est probablement le passage avec le courant le plus intense d'Europe. Ce raz est situé entre la pointe la Hague et l'île anglo-normande d'Aurigny à l'entrée nord du passage de la Déroute (si un nom pareil ne fait pas frémir…).

Le raz Blanchard © PDLM

Le passage du Fromveur n'est pas officiellement nommé un "raz", mais il en possède les caractéristiques. Il est situé entre l'île de Molène et celle d'Ouessant. Le courant peut atteindre 9 nœuds localement, et presque 7 nœuds à mi-marée de vives eaux dans tout le passage. À éviter absolument lorsque le vent souffle contre le courant, car la mer déferle considérablement.

Kéréon est le phare qui balise le Fromveur, un passage entre l'île d'Ouessant et l'archipel de Molène.

Le raz de Sein sépare la mer d'Iroise de la Bretagne sud. C'est un passage entre l'île de Sein et la pointe du Raz, dans le Finistère, en Bretagne. Les marins disposent d'une entrée large de 4 milles, il est réputé pour ses brisants et son violent courant.

Le raz de Sein photographié depuis la terre, au fond on aperçoit l'île de Sein

Quelle est l'influence des courants de marée sur l'état de la mer ?

Le phénomène de marée déplace des millions de litres d'eau qui vont et viennent à longueur de journée. Ces gigantesques mouvements d'eau qui constituent les courants de marée, ce qui signifie que les marins se déplacent sur une surface mouvante. C'est un peu l'équivalent d'un marcheur sur un tapis roulant, il comprend vite qu'il y a un sens favorable.

En bateau, c'est pareil ou presque, car l'état de la mer est considérablement modifié par les courants. Le courant est si puissant que la mer en surface n'y résiste pas, elle devient chaotique, elle est littéralement démontée.

En cas de houle contraire au courant, on verra souvent apparaitre une "barre" de déferlement quasi immobile qu'il est préférable d'éviter. Mais attention à la route fond, car le courant vous y emmènera probablement.

Le courant en mer c'est comme une rivière

À proximité des raz, les côtes et les rochers sont autant d'obstacles au mouvement de l'eau qui parfois sera accélérée et d'autre ralenti.

L'observation d'une rivière est riche d'enseignements qui peuvent être transposés à la mer soumise au courant.

- Sur les berges peu profondes, le courant est moins fort que dans le lit du courant. Il en va de même en mer, les zones de faible profondeur sont moins soumise au courant.

- Si une roche fait obstacle, le courant sera plus fort de chaque côté de la roche et très faible derrière elle. Les îles ou les rochers de rivière réagissent de la même manière.

Quelques conseils pour passer un raz

  • La pratique de ces lieux requiert un bateau aux qualités marines éprouvées.
  • Avant de s'y engager, il faut s'assurer de disposer d'un vent modéré et d'une mer relativement calme, et cette notion dépend de chaque bateau.
  • Il est déconseillé de passer un raz avec un vent s'opposant au courant (et inversement).
  • Si le vent est opposé au courant favorable, on attendra l'étale de marée pour le passage délicat, c'est le moment ou la mer sera la moins démontée.
  • Si le vent est dans le même sens que le courant, on profitera du début de courant favorable pour passer le raz plus vite.
  • On évite toujours de pratiquer les raz aux heures où le courant est le plus fort (la mi-marée locale) même s'il est favorable
  • Les heures de marée du port de références doivent être corrigées pour le raz que l'on souhaite passer. La marée est une onde qui se propage, ainsi il y a un décalage notable entre l'étale du port de référence et celle du raz que l'on va emprunter.

Préparer le bateau et l'équipage

  • Il ne faut pas être sous toilé en pensant être prudent. Pour être parfaitement manœuvrant, il faut porter la toile du temps.
  • Pour l'équipage, c'est le fameux cocktail, harnais/gilets/longes capelées.
  • Quitte à réduire, il faudra plutôt prendre un ris pour conserver de la puissance avec le génois pour passer les vagues.
  • Le moteur doit être opérationnel pour assurer votre sécurité en cas d'avarie de voile.
  • Vérifier le bon fonctionnement de la VHF si ce n'est pas déjà fait - grâce au sémaphore par exemple.
  • Même par beau temps, vérifiez la bonne fermeture des hublots, et pourquoi pas clore le panneau de descente ? Parfois, même par mer calme, des vagues un peu vicieuses ne demandent qu'à rentrer à bord.
  • Tout caler à l'intérieur et à l'extérieur. La mer va devenir chaotique durant quelques instants.
  • Mettre un sceau à disposition si certains équipiers sont sensibles au mal de mer.
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Dominique Raoul
Dominique Raoul
J'ajouterais : - même au moteur garder un peu de toile pour appuyer le bateau, - sur mer très courte prendre les vagues de face avec un léger angle puis amortir la "chute" en abattant dans le creux, - si la houle est face au courant, je me présente toujours face au raz avec un peu d'avance (1/2h) afin d'être repoussé par le courant et, lorsqu'il s'inverse, prout, je passe au meilleur moment. Merci pour la photo du tourduf
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