Interview / The Ocean Race, la fin annoncée de la monotypie

© Jean-Marie Liot/Alea

Habituellement courue en monotype, The Ocean Race s'ouvre aux IMOCA pour la prochaine édition en octobre 2021. Les VO65 seront encore dans la course, mais réservés aux jeunes équipages. Entretien avec Johan Salén, Directeur Général.

Courant 2018, on apprenait le changement de propriété de la Volvo Ocean Race. Désormais appelée The Ocean Race, elle appartient dorénavant à Atlant Ocean Racing Spain, mené par Richard Brisius, Johan Salén et Jan Litborn, et se déroulera sur deux classes de bateaux.

La prochaine édition de The Ocean Race (Whitbread Round the World Race de 1973 à 1997 puis Volvo Ocean Race de 2001 à 2018) aura lieu courant 2021-2022. Pour ouvrir la course au monde ultra technologique de la course au large française, les nouveaux organisateurs ont décidé de faire des IMOCA la nouvelle classe de The Ocean Race. On trouvera donc désormais deux types de bateaux sur la ligne de départ, les VO65 d'un côté et les IMOCA de l'autre.

Pourtant, il y a deux ans, le futur des 65 pieds n'était pas assuré, comme nous l'explique Johan Salen.

IMOCA, classe principale de The Ocean Race

"Il y a deux ans, nous avons commencé à étudier différentes options pour intégrer une nouvelle classe de bateaux à la course. Historiquement, la course a toujours créé ses propres bateaux, d'abord les Volvo Ocean 60 puis ensuite les Volvo Open 70 et plus récemment les Volvo Ocean 65. Ces derniers avaient été pensés pour participer à deux tours du monde et lors de l'arrivée de la dernière édition à La Haye, fin 2019, leur carrière aurait dû s'arrêter là."

La nouvelle direction cherche donc les remplaçants des VO65 pour l'édition 2021-2022 et fait la rencontre d'Antoine Mermod, président de la classe IMOCA. Le courant entre les deux entités passe bien et un contrat est mis en place stipulant que la classe IMOCA sera la classe principale pour le futur de l'évènement. Il faut dire que l'organisation apprécie particulièrement l'aspect technologique représenté par ces bateaux (surtout les nouveaux foilers).

"Grâce à cette collaboration, nous fusionnons le milieu français de la voile au milieu anglo-saxon et plus globalement international que représente la course. La course au large est typiquement française et dispose de véritables avantages techniques et de sponsors qui évoluent dans ce milieu depuis très longtemps. En intégrant The Ocean Race, la classe IMOCA va s'internationaliser, ce qui va créer encore plus de valeurs pour les sponsors. C'est un évènement international — qui ne repose certes pas sur le même concept que le Vendée Globe — mais qui possède un vrai atout médiatique. On travaille avec la télévision, les villes escales et les réseaux sociaux pour apporter un maximum de visibilité. On a un très bon potentiel d'évolution commune."

© Jean-Marie Liot / Aléa / Charal

Quel avenir pour les Volvo Ocean 65 ?

Lorsque les nouveaux organisateurs reprennent la course, six des huit bateaux sur le marché appartiennent à l'organisation. Ils décident alors de les vendre pour que chaque équipe soit propriétaire de son VO65. "Ce sont des bateaux costauds qui peuvent continuer à naviguer et à participer à d'autres courses."

Finalement, quelques mois après la reprise de la course, les organisateurs se posent la question d'inclure les 65 pieds pour ce troisième tour du monde. Après tout ce sont des bateaux solides, mais la décision n'est pas facile à prendre.

"On a finalement décidé de les faire participer à une édition supplémentaire et d'utiliser cette classe pour faciliter l'entrée d'équipes plus jeunes et récentes dans le monde de la course au large. C'est d'ailleurs pour ça qu'il y a des règles assez strictes dans cette classe."

En effet, sur les 10 équipiers du bord, 7 devront avoir moins de 30 ans et 3 moins de 26. Outre ces aspects, afin de respecter la parité et de continuer à développer la filière féminine, l'équipage devra accueillir à son bord 3 équipières.

"On espère contribuer à créer une nouvelle génération de navigateurs et navigatrices pour le futur. Ce sport a besoin de se renouveler, d'où notre décision d'inclure les VO65. Ce sont des bateaux moins compliqués que les IMOCA, qui sont très sophistiqués, et des projets plus faciles à démarrer. Si aujourd'hui les bateaux sont tous vendus, il y a deux ans, on pouvait en acheter d'occasion pour moins d'un million d'euros.

C'est aussi plus compliqué pour les jeunes équipes sans expérience de développer un IMOCA aussi bien financièrement que techniquement. Avec les VO65, tout le monde a le même bateau."

Si sur cette prochaine édition, l'organisation réussit à mixer la technologie de l'IMOCA à l'accessibilité du VO65, cette dernière souhaite n'avoir plus que des IMOCA en 2025.

"On ne sait jamais ce que réserve le futur, mais les VO65 auront fait 3 tours du monde. Leur design commence à vieillir et les bateaux cumulent énormément de milles. On espère avoir une base de projets avec suffisamment de niveau et d'expérience pour passer uniquement en IMOCA en 2025."

Règles différentes, classement différent

Qui dit deux classes différentes dit deux classements différents. Le nombre d'équipiers à bord ne sera pas le même non plus. S'ils sont 10 à bord des VO65, ils ne seront que 5 sur les IMOCA. En effet, ces derniers sont plus adaptés à la navigation en solitaire ou en double, offrant moins de place à bord. Une problématique qui n'en est d'ailleurs pas une pour le directeur général.

"Les IMOCA modernes s'adaptent très bien à la navigation en équipage. Ce sont des bateaux très sophistiqués et l'on n'est pas trop de deux ou trois sur le pont pour bien faire marcher ces foilers. C'est sûr que certains bateaux s'accommodent moins de cet aspect, comme Hugo Boss, dont le design est assez extrême. Sur d'autres bateaux, comme Charal ou Arkea Paprec, il suffira de procéder à de petites modifications, comme le système de barre ou des solutions pour dormir à l'intérieur. D'une manière générale, et d'un point de vue performance, les architectes ne voient pas beaucoup de changement. Il faudra juste trouver des solutions pour vivre à bord."

Sur la prochaine édition, on retrouvera également des navigatrices. Pour rappel, l'organisation incitait les équipages à inclure des femmes dans leur équipage pour l'édition 2018/2019. Ainsi, en 2021, les VO65 devront avoir à leur bord au moins trois navigatrices et les IMOCA au moins une.

"Cette règle s'est révélée très positive sur la dernière édition et on a tous été d'accord pour continuer avec un concept similaire."

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