Nous avons vécu 8 mois à 4 dans un Ecume de Mer : la descente aux enfers

Après avoir passé une première saison idyllique à 4 sur notre Écume de Mer dans le port de Morgat en été 2023, nous sommes impatients de retrouver notre vie à flot pour 4 mois, de juin à septembre 2024. Mais le froid polaire qui s'abat sur la Bretagne cette saison-là transforme notre rêve en cauchemar, et nous comptons les jours qui nous séparent de nos retrouvailles avec notre maison, que nous louons pendant la belle saison.

On avait oublié, mais en Bretagne, l'été, il ne fait pas chaud.

Nous nous sommes installés à Crozon en 2014, et depuis que nous sommes là, nous n'avons pas vraiment eu un "temps breton" pendant les étés successifs. Je me rappelle d'un 30 mars 2015 où il faisait 30 degrés, et d'un 3 novembre 2016 où il en faisait 21. En Bretagne, depuis que nous sommes arrivés, en été il fait chaud et beau, avant et après l'été aussi.

En 2024, la position de l'anticyclone des Açores resté trop à l'ouest a privé notre région de conditions climatiques estivales et chaudes, et à bord du bateau, cela s'est tout de suite ressenti. Dès le 1er juin, nous devons installer un mini radiateur bain d'huile, afin de ne pas grelotter nuit et jour.

L'ambiance du ciel pendant tout l'été à Morgat
L'ambiance du ciel pendant tout l'été à Morgat

On avait oublié, mais les enfants ça grandit, et les parents ça vieillit 

Nos enfants ont grandi, et leurs parents ont vieilli : il y a encore moins de place dans le bateau, et nos corps d'adultes de 40 ans ont bien du mal à s'adapter à cet espace exigu. Le charme de la nouveauté a disparu, et nous avons toutes les difficultés à trouver nos marques et un confort durable pendant cette deuxième saison à bord… 

Pour ne pas arranger les choses, notre gréement est endommagé et nous devons changer tous les haubans de Sea-Sea. Nous sommes cloués à la piste jusqu'à ce qu'un gréeur trouve le temps de les remplacer, ce qui ne se fera pas avant la mi-août… Et nous tournons en rond, sur place. Les enfants ne remarquent pas trop ces désagréments, tout glisse sur eux, et tant que nous gardons le sourire, ils sont contents. Pas une seule fois ils n'ont demandé à retourner dans leur maison qu'ils n'ont pas vue pendant 4 mois… et heureusement car s'il avait fallu gérer leur frustration sur ce point, on allait droit au naufrage.

même assis, Jean touche le plafond
Même assis, Jean touche le plafond

Mais nous avons bien du mal à le garder, nous, ce sourire… Jean et moi nous cognons plusieurs fois par jour la tête ou les jambes, nous ne sommes plus aussi flexibles et tolérants que l'année précédente, et soit nous jurons bruyamment pour expier la douleur, soit nous partons dans des fous-rires nerveux, à chaque fois que nous entendons un bruit sourd, témoin d'une paroi qui est entrée en collision avec notre corps.

Liste non-exhaustive de tout ce qui m'énerve

Je ne supporte plus d'aller m'enterrer tous les soirs dans la banette cercueil, je ne supporte plus que nous n'ayons pas l'eau courante, je ne supporte plus d'aller remplir notre jerrican tous les jours au ponton.

Je ne supporte plus de faire la vaisselle accroupie.

Je ne supporte plus les douches des sanitaires du port qui n'ont pas un débit assez fort pour nous réchauffer et qui sentent les égoûts.

Je ne supporte plus que mes enfants passent tous les jours devant le manège et la pêche au canard installés à l'entrée du port, en me harcelant de les y emmener.

derrière ce sourire se cache une femme au bord de la crise de nerfs
Derrière ce sourire se cache une femme au bord de la crise de nerfs

Je ne supporte plus de me faire réveiller le matin par les bateaux de parisiens qui partent à la pêche en hurlant pendant leurs manoeuvres à 7h, et ne conçoivent pas qu'il y a des gens qui dorment dans les bateaux autour en plein mois de juillet.

Je ne supporte plus de devoir sortir du bateau pour rallumer l'electricité à chaque fois qu'elle est coupée toutes les 12h, parfois en pleine nuit parce que cela arrête notre chauffage.

Je ne supporte plus d'avoir froid, d'avoir mal dormi, d'être fatiguée, et de devoir m'occuper toute la journée dans ces conditions de 2 enfants en pleine forme qui ne demandent qu'à courir partout et rigoler.

Je ne supporte plus de devoir démonter ma table du carré pour installer un lit tous les soirs, et de tous les matins démonter ce lit pour retrouver la table du carré.

Je ne supporte plus de ne jamais trouver de place de parking dans le port, et de devoir marcher 10 minutes à chaque fois que je veux prendre la Twingo, on se croirait à Paris !

Je ne supporte plus les fuites d'hydrocarbures qui nous entourent d'une mer qui pue l'essence...

le gasoil c'est beau mais ça pue
le gasoil c'est beau mais ça pue

Cette aventure se transforme en chemin de croix, en grande partie à cause du froid et de la pluie qui ne nous laissent que de rares journées de répit.

Quelques rares réconforts viennent adoucir le quotidien

J'investis beaucoup le Relais des Pêcheurs, un bar réconfortant avec un baby-foot, où je me console et me réchauffe en buvant des irish coffee pendant que les enfants jouent en ignorant que leur mère se noie dans le désespoir. Le matin quand je n'ai pas la force de réinstaller la table du carré pour le petit déjeuner, j'emmène les enfants manger à la boulangerie. Les commerces de bouche de Morgat sont ma deuxième maison.

Petit dej' à la boulangerie avant l'école
Petit dej' à la boulangerie avant l'école
Baby Foot au bar après l'école
Baby Foot au bar après l'école

C'est l'enfer, mais nous finissons par retrouver notre gréement. Aussitôt installé, nous partons dans les pires conditions, pétole et pluie, retrouver l'air du large et dégourdir les voiles de notre Écume de mer. De toute façon, après les presque 3 mois que nous venons de vivre, plus rien ne nous fait peur, et cet été là, s'il avait fallu attendre qu'il fasse beau et chaud pour larguer les amarres, et bien nous n'aurions pas eu beaucoup d'occasion de nous échapper.

Sous ces K-way, deux enfants dorment paisiblement sous la pluie dans la pétole
Sous ces K-way, deux enfants dorment paisiblement dans le froid, la pluie et la pétole

Après 4 mois de froid, d'humidité, et de souffrances, (plus long qu'un Vendée Globe !) nous finissons par retrouver notre maison, et réalisons que nous venons de réaliser un sacré exploit tous les 4 entassés dans notre Écume de Mer pendant tout ce temps… Cette fois-ci, nous ne sommes pas prêts de recommencer, ou alors avec un bateau bien plus grand - au moins 9 mètres de long - dans lequel Jean pourra se tenir debout sans dépoussiérer le plafond avec ses cheveux.

L'Écume de mer à 4, c'est la cour des miracles
L'Écume de Mer à 4, c'est la cour des miracles

Nous cherchons donc une belle occasion de 9 mètres, ou pourquoi pas, un autre don de bateau ! 

Sommaire du reportage

1 Récit : première navigation en famille dans un Écume de Mer

Récit : première navigation en famille dans un Écume de Mer

2

"On nous a donné un Écume de Mer, alors qu'on en avait déjà un !"

3 Nous avons vécu 8 mois à 4 dans un Écume de mer : le paradis flottant

Nous avons vécu 8 mois à 4 dans un Écume de mer : le paradis flottant

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Ecume de Mer La fiche technique
7.92 mLongueur hors-tout
2.67 mLargeur - Bau
1 814 kgDéplacement lège
Voir la fiche technique du Ecume de Mer
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Boris Auche
Boris Auche
Il y a 50 ans, tout a commencé à bord d’un Écume de Mer. Pas le mien, mais celui de mon oncle Philippe. Ce petit voilier, premier habitable, a été mon école de la vie et de la mer. À une époque où l’on pouvait encore rentrer à la voile dans le port des Minimes à La Rochelle, j’ai appris à naviguer, à lire les étoiles et à écouter le vent. Je me souviens des couchettes « cercueil », si inconfortables qu’elles en devenaient presque exotiques, comme celles des pirates dans leurs bannettes. Des quarts de nuit où l’on picolait pour tenir le coup, des réveils avec les premières lueurs du jour, bercé par le clapotis de l’eau. Ces années furent initiatiques. J’ai découvert non seulement la navigation, mais aussi le partage, l’aventure et cette liberté unique qu’offre la mer. Mon oncle Philippe, tu ne sais peut-être pas à quel point ces moments vécus ensemble m’ont marqué. Ils sont gravés dans ma mémoire comme les meilleurs de ma jeunesse. À toi, à cet Écume de Mer, et à tous ceux qui transmettent la passion de la voile. Merci
Michel Rivière
Michel Rivière
Bonjour , Je connais une famille de 4 qui ont vécu à l'année dans un navire de taille semblable et qui ont du attendre l'adolescence des enfants pour changer de navire car les enfants nés à bords s'opposait à un changement de "maison" . Pour ma part , j'ai vécu 6 ans dans mon 6.50 dont 2 en couple .La mère de mes enfants ne voulais pas en avoir à bord , ce qui fut la cause de l'achat très couteux d'une maison . Les travaux de rénovation nécessaires , m'ont conduit au burn-out cause du divorce ... Aucun choix n'est facile a assumer ...
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