Interview / Routage de la Jaques Vabre 2021, une dorsale risque de gâcher la fête

Erwan Israël

Erwan Israël est l'un des routeurs de Franck Cammas et Charles Caudrelier sur cette Transat Jacques Vabre 2021, skippers du Maxi Edmond de Rothschild. À trois jours du départ, il nous livre son analyse météo du départ et des jours à venir, ainsi que les pièges qu'il faudra éviter.

Un départ pour assurer le spectacle

Dimanche 7 novembre 2021, les 79 concurrents de la Transat Jacques Vabre s'élanceront depuis le Havre, direction Étretat pour le grand plaisir des spectateurs. Et le spectacle devrait être assuré puisque le vent devrait être suffisant pour que les bateaux aillent vite, comme nous l'explique Erwan Israël, routeur pour le Maxi Edmond de Rotschild.

"Le départ dimanche est pour l'instant assez sympa. Il va y avoir 15/20 nœuds de vent. C'est plaisant pour des bateaux volants, même s'ils seront au près débridé. Les bateaux seront à des allures assez rapides, ce qui est pas mal pour le spectacle. En termes de manœuvres, ça simplifie aussi les choses avec un vent d'ouest-nord-ouest bâbord amure. Ils n'auront pas trop à en faire, ce qui est mieux à deux. Après la dernière bouée du parcours côtier, ils feront un bord de près pour démancher en tribord amure, avec un petit front de nord-ouest derrière. Il faudra donc démancher le plus vite possible avec du vent entre 15 et 25 nœuds au début. Ce sera une course de vitesse."

Une complication à gérer dès la première nuit

 Si le début du parcours s'annonce donc assez facile, une première complication va arriver dès la première nuit.

"Il va falloir batailler avec le petit temps le long des côtes bretonnes. On risque de flirter avec de la molle et de s'empétoler entre la dépression et les côtes. Est-ce que les bateaux vont réussir à se faufiler et prendre du vent portant au Cap Finisterre ou la dépression va passer et ils vont se retrouver coincés au nord-ouest de la dorsale ? Les Ultim ont encore la possibilité d'attraper les vents portants le long du Portugal très tôt, mais pour les bateaux moins rapides, ça sera fermé. La question qui se pose c'est donc de savoir s'il faudra faire un grand tour par l'ouest parce que la porte est fermée ou le schéma opposé, avec des vents portants qui vont permettre de s'extirper et de creuser l'écart. La position de cette dorsale va être la clé pour choisir la position des bateaux. Dès la première nuit, ça va être une clé stratégique de la course. Si certains arrivent à passer au portant au sud de la dorsale, ça peut créer de gros écarts".

Départ de la TJV 2019
Départ de la TJV 2019

Une course assez lente

Pour l'instant, il est encore trop tôt pour faire des choix nous explique le routeur. Les fichiers changent rapidement et rien n'est encore figé. Le reste de la course devrait être plutôt lent, en raison des alizés faiblards. Alors que dans une situation favorable, le temps de courses des bateaux les plus rapides aurait pu être de 12 à 14 jours, aujourd'hui, les prévisions sont plutôt sur une fourchette de 14/16 jours ou de 16/18 jours. Tout dépendra du parcours choisi.

"Sur la partie alizée, ils sont très faibles. Il y a pas mal de dépressions qui circulent au milieu de l'Atlantique. Il y aura sans doute quelques options à prendre, des trajectoires à affiner plus tard. En tout cas la descente vers l'Équateur ne sera pas très rapide."

En effet, les routages annoncent pour l'instant un passage d'Équateur entre 7 et 8 jours…

Deux passages de Pot au Noir

Il faudra ensuite négocier avec le Pot au Noir, que tous passeront deux fois (excepté les Class40). Et comme chacun sait, celui-ci peut s'avérer piégeur…

"La particularité de ce nouveau parcours, c'est un double passage du pot au noir. C'est doublement piégeur. Quand on le passe, c'est la libération. On peut y perdre 200 milles. Pour l'instant il n'est pas hyper actif, mais c'est encore loin.

Ce qui change un peu avec le waypoint de Trinidade pour les Ultim c'est que sur un Jules Verne, quand on passe le pot au noir, on accélère au large des côtes du Brésil. Là, ça va être du près serré. On va devoir garder de l'aise dans notre route, selon la direction des alizés du sud, ce ne sera pas facile de passer le pot au noir le plus à l'est possible. Il n'y a aucune certitude qu'il y ait des alizés. Mais si c'est le cas, le premier qui prend du vent adonnant après le pot au noir creusera les écarts. Dans tous les cas, l'organisation se laisse la possibilité de modifier le parcours, on ne sait donc pas où on ira si le waypoint bouge."

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Stephane meteo-formation
Stephane meteo-formation
A postérori, c'était une très bonne analyse météo pour cette transat. Bravo!
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