Quelle définition et quel avenir dans le nautisme derrière le mot résine biosourcée ?

De plus en plus de bateaux font appel à la résine époxy biosourcée, à l'image de Couach qui a mis à l'eau un yacht de 26 m, premier navire d'une future série. Pierre Lacoste, technico-commercial chez Sicomin, spécialiste de la résine époxy, nous explique les développements en cours dans le domaine des résines plus vertueuses.

Spécialiste de la résine époxy

Sicomin est une PME française de 60 salariés installée principalement à Châteauneuf-les-Martigues (13). Son cœur de métier porte sur la fabrication de résine époxy, l'une des trois principales résines avec le polyester et le vinylester, utilisées dans la construction nautique, de plaisance (voile et moteur) et professionnelle.

"L'époxy a de meilleures valeurs mécaniques et thermomécaniques (tenue en température). On l'utilise pour la fabrication de bateaux de plaisance plutôt haut de gamme ou sur des bateaux de course. La résine sert à l'assemblage de toutes les pièces : reprise de stratification sur les ponts, les coques, les cloisons. On l'utilise dans la fabrication du bateau, mais aussi pour les collages."

Outre la fabrication de résine, Sicomin propose également des matériaux d'âme (mousse, liège…) et des matériaux de renfort (fibre de verre, carbone, lin…) qui viennent compléter la prestation époxy.

Une gamme de résine biosourcée

"Sicomin a 35 ans d'existence et a commencé à travailler sur la résine biosourcée il y a une quinzaine d'années. Le travail de biosourçage ne porte que sur la résine et non sur le durcisseur. Pour rappel, la polymérisation du matériau se fait en mélangeant une résine et un durcisseur. Nous avons développé la famille des Greenpoxy dont la molécule d'épichlorohydrine est obtenue à partir du glycérol, une matière première végétale. On utilise le mimétisme moléculaire en remplaçant une molécule issue de la pétrochimie par une molécule issue des végétaux, une matière première plus noble."

Aujourd'hui, le fabricant a développé 3 résines biosourcées. La Greenpoxy 56 est celle qui offre le taux de de matière première biosourcée le plus élevé avec 56 % de carbone d'origine végétale. Pour différencier une résine pétrochimique d'une résine biosourcée, on réalise une datation au carbone 14. Cela va permettre de valider un âge de molécule. Si celui-ci est très élevé, alors il s'agit de carbone, s'il est récent, il s'agit de végétal.

"Il y a 15 ans, quand nous avons commencé à travailler sur la R&D d'une résine biosourcée et sur la filière d'approvisionnement des matières premières, ce n'était pas viable. Nous n'avions pas accès à des quantités suffisantes par rapport aux coûts de ces matériaux. Depuis 5 ans, l'engouement s'est affirmé. Il y a une prise de conscience générale et le client final est de plus en plus vigilant. Le consommateur est de plus en plus soucieux de son environnement."

Les différents types de résines biosourcées
Les différents types de résines biosourcées

Des techniques de mise en œuvre similaires à la résine traditionnelle

À ce jour, les résines biosourcées nécessitent les mêmes process de fabrication qu'une résine carbonée et offrent la même résistance mécanique.

"Quand on a décidé de développer une résine biosourcée, on a reformulé la base avec des matières biosourcées. Les résines pétrochimiques et les résines biosourcées s'utilisent avec le même durcisseur. C'est techniquement simple de basculer d'une résine à l'autre."

Le prix est également assez similaire à une résine conventionnelle. Si la résine biosourcée permet de minimiser l'impact environnemental en amont de la construction, elle n'est pas par la suite recyclable.

"La résine époxy est dite thermodurcissable. Elle polymérise grâce à la chaleur et une fois polymérisée, elle n'est pas recyclable. Il existe des moyens de recyclage, mais ils sont très couteux et néfastes au niveau de la pollution. Ce n'est pas intéressant de dépolymériser l'époxy. Nous travaillons en ce sens sur la qualité de nos résines pour offrir une durée de vie plus longue."

Vers une résine 100 % biosourcée ?

"Tous les développements qui sont faits tendent à utiliser le plus possible de matière première végétale. Des solutions sont développées en laboratoire, mais tous les freins ne sont pas déverrouillés."

Le Floki 6.5, construit à base de résine biosourcée
Le Floki 6.5, construit à base de résine biosourcée

Un accompagnement global dans le choix de matériaux biocomposites

Outre la résine, Sicomin accompagne ses clients de manière plus globale en leur offrant un panel de matériaux plus vertueux : des fibres naturelles comme le lin qui offre de bons résultats, couplé à de la fibre époxy, le chanvre ou le basalte, des matériaux d'âme comme le liège, de la mousse PET (à partir de plastique recyclé) ou du balsa.

"Le balsa est issu du bois. Il était très utilisé dans les années 70/80 pour fabriquer des pièces au contact. Mais très sensible à l'humidité, il finissait par pourrir en cas d'infiltration. Grâce à l'infusion, le balsa redevient intéressant, car c'est un produit biosourcé avec des propriétés mécaniques. À densité égale, il surpasse toutes les mousses. Une fois infusé, il est parfaitement encapsulé et étanche."

Des développements pour l'avenir

Plusieurs développements sont en cours chez Sicomin. À commencer par une résine biosourcée à haut module (forte résistance mécanique) pour une construction en infusion ou par stratification au contact. La PME travaille également sur une résine biosourcée pour le bois.

"L'époxy est utilisé pour l'infusion, le collage, l'imprégnation. Pour chacun de ces process, on fabrique des époxys biosourcés", conclut Laurent Lacoste.

Plus d'articles sur le thème
Réagir à cet article
Ajouter un commentaire...