Jean Bart, corsaire et grand coureur

Maxime Dalle, ”enfant” de Jean Bart, part sur les traces de son ainé.  Il organise une ”expédition maritime” en Manche en septembre 2020. L'occasion de revenir sur l'histoire mouvementée de ce corsaire de légende.

Jean Bart : Ce nom est certainement évocateur pour les Dunkerquois et autres férus d'histoire maritime. Les Parisiens connaissent peut-être ce curieux patronyme par une ruelle du sixième arrondissement qui jouxte la rue Duguay-Trouin, à quelques pas du jardin du Luxembourg.

Jean Bart, l'on pourrait aussi dire Jan Baert à la flamande, est le premier capitaine corsaire anobli par le Roi-Soleil en 1694. Car c'est précisément lui qui a donné ses lettres de noblesse à la course corsaire.

Un vrai Dunkerquois

L'homme est né un 21 octobre 1650 à Dunkerque. À cette époque, la ville est un carrefour stratégique pour les grandes puissances européennes. Elle est à la croisée de la mer du Nord et de la Manche, de la Hollande et de l'Angleterre. Car ce qui fait la singularité de Jean Bart c'est tout d'abord sa ville natale. Dunkerque est la cité corsaire par excellence, tantôt espagnole tantôt flamande tantôt anglaise puis française grâce à Louis XIV qui décide d'acheter la ville définitivement en 1662. Il chargera le Maréchal Vauban d'en faire une cité fortifiée, une ville portuaire indispensable pour le royaume de France.

Un marin avant tout

Gravure de Pierre Ozanne, les combats de Jean Bart
Gravure de Pierre Ozanne, les combats de Jean Bart

Mais revenons au petit Jean Bart. Dès l'âge de 12 ans, le petit capre (corsaire) fait ses premières classes sur un bateau de contrebande. À 16 ans, c'est en tant que mousse qu'il participe à la victoire épique des Hollandais, sous le commandement de l'amiral Ruyter, face à la flotte anglaise qui bat en retraite à l'embouchure de la Tamise.
Jean Bart est un marin précoce, déterminé, d'une taille imposante, certains lui prêtent plus de deux mètres de hauteur, des yeux bleus perçant, une chevelure blonde nordique, un accent flamand prononcé, un tempérament rude, un tantinet colérique.

Ce sont ces facettes multiples qui lui permettent d'être un chef d'escadre renommé, redoutable pour ses adversaires, n'hésitant pas à prendre la tête de ses hommes lorsqu'il s'agit de partir à l'abordage et de foncer sur un amiral ennemi, sabre au clair.

Un homme de guerre

La bataille du Texel, 1694
La bataille du Texel, 1694

Son sens aiguisé de la stratégie et son audace à toutes épreuves font de lui un homme incontournable pour la marine royale. Comme lors de la bataille du Texel au large d'Amsterdam, victoire qui sauvera la France en 1694 de la famine. Jean Bart, après un combat épique face à une flotte hollandaise en surnombre, rapatrie à Dunkerque et au port du Havre plus de 130 navires tous chargés de blé. La France échappe à la disette, la cour de Louis XIV est fascinée par ce marin, fumeur de pipe invétéré aux manières rustaudes. Le colosse Jan Baert devient le chevalier Bart.

Une évasion rocambolesque

Jean Bart et Forbin s'échappent de Plymouth à la barque
Jean Bart et Forbin s'échappent de Plymouth à la barque

De l'audace et du courage, Jean Bart en eut également lors de son évasion de Plymouth où il fut emprisonné en 1689. L'on peut admirer au Musée de la Marine à Paris une gravure où Forbin et Jean Bart s'enfuient de la baie de Plymouth à la barque. Les deux compagnons d'infortune traversent la Manche et ses tempêtes jusqu'à Saint-Malo en deux jours seulement. Un exploit. Car Jean Bart est de ces diables d'homme qui, à l'instar de l'aviateur Henri Guillaumet, est capable d'affronter la nature et les éléments dans des conditions extrêmes. Ce que Jean Bart a réalisé lors de son évasion « pas une bête ne l'aurait fait. »

Pour l'anecdote, c'est parce que Dunkerque fut une ville européenne, brassée par moult langues, que Jean Bart put quitter Plymouth en toute discrétion. Un bâtiment britannique lui demande de décliner son identité. Il réplique dans un anglais parfait : « Fishermen ! » Nous sommes des pêcheurs ! Mot magique qui lui permet de prendre la poudre d'escampette. Car Jean Bart parle aussi bien le flamand, l'espagnol, le français que l'anglais.

Le premier d'une longue lignée de corsaire

Statue de Jean Bart à Dunkerque
Statue de Jean Bart à Dunkerque

Après sa mort en 1702, le plus grand corsaire de Dunkerque aura pour descendance spirituelle les non moins fameux Duguay-Trouin et Surcouf. Tous deux malouins, tout aussi téméraires que leur maître en course corsaire.

L'amiral hollandais qui fut vaincu quelques années plus tôt au Texel par Jean Bart écrivit ces derniers mots avant d'expirer: « La consolation que j'ai et d'avoir été vaincu par des héros. »

Une expédition sur les traces de Jean Bart

Et c'est dans le sillage de ce corsaire illustre, lointain ancêtre de ma famille, qu'avec Patrick Tabarly et un petit équipage, nous avons entrepris pendant ce mois de septembre 2020 une expédition maritime. Nous écumerons les flots de la Manche avec deux grandes escales à Dunkerque et Saint-Malo, dans l'ombre des victoires de Jean Bart, au large de l'Angleterre, et revivrons son évasion spectaculaire des pontons de Plymouth qui ont fait de lui le plus grand marin de son temps.

Maxime Dalle

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