Stabilité : 2 grandes raisons pour lesquelles un bateau reste à l'endroit

Des multicoques, très stables, jusqu'à un certain point ! © Briag MERLET

La stabilité du navire est un domaine de l'architecture navale qui peut paraître obscure. Essayons de comprendre quelques grandes règles qui permettent à nos bateaux de ne pas chavirer et de rester à l'endroit.

Écoutez cet article

La stabilité du navire, un phénomène complexe

Lorsque l'on dessine un bateau, l'un des objectifs évidents est qu'il reste à l'endroit. Si cela peut paraître une réflexion stupide, il a fallu longtemps aux constructeurs et architectes navals pour réellement comprendre les phénomènes en jeu, les modéliser et être en mesure de les calculer et de les anticiper. L'histoire célèbre du naufrage du Vasa dès sa mise à l'eau en témoigne.

A force d'expérience, des formules mathématiques, que nous ne détaillerons pas ici, ont été mises au point pour estimer la capacité d'un bateau à retrouver l'équilibre, caractérisée par son moment dit de redressement. Sommairement, la courbe représente graphiquement, l'effort nécessaire pour faire incliner le bateau en fonction de son angle de gite.

Une courbe de stabilité de monocoque large
Une courbe de stabilité de monocoque large

Son calcul met en lumière 2 facteurs clefs, que l'on appelle la stabilité de forme et la stabilité de poids.

La forme de carène, 1er gage de stabilité

Si l'on prend 2 bateaux de même poids, mais que l'on dessine des formes de carène différentes, leur stabilité différera. Un tronc d'arbre rond, long et étroit n'aura pas le même comportement qu'un bac, large et court, nettement plus difficile à faire giter, au moins au début.

La largeur est un élément clef. Un bateau étroit gite progressivement et acceptera de forts angles sans se retourner. Au contraire, un bateau large sera très stable aux petits angles de gite, avant généralement de chavirer plus brutalement. Mathématiquement, la stabilité est liée à l'inertie du plan de flottaison du bateau par rapport à son axe. Le cas extrême est ainsi celui d'un multicoque, très large, mais qui perd brutalement en stabilité lorsqu'il lève une coque et perd ainsi en inertie de son plan de flottaison.

La largeur comme gage de stabilité
La largeur comme gage de stabilité

Pour gagner en stabilité de forme, on cherchera ainsi à élargir les carènes ou à ajouter des flotteurs. Dans les navires de commerce, il arrive que les ferries, s'alourdissant d'équipements dans le temps soient "soufflés", c'est à dire reçoivent des sortes de bourrelets supplémentaires sur les côtés à la flottaison pour récupérer en stabilité.

Lester le bateau, au bon endroit !

L'autre gage de stabilité est le poids. Encore faut-il le mettre au bon endroit. Une fois de plus l'instinct nous dit que de mettre un rocher en tête de mât n'est pas une bonne idée, ce que nous confirment les calculs ! C'est en réalité la masse et la distance entre le centre de gravité et le centre de carène, c'est-à-dire le centre du volume immergé, qui définissent le moment de redressement.

Les dériveurs se retournent parfois plus vite
Les dériveurs se retournent parfois plus vite

C'est probablement cette propension à la décoration, haut placée pour être visible, qui a provoqué le naufrage du Vasa. Les marins ont vite constaté que leurs navires sans cargaison risquaient de se retourner, et avaient tendance à les lester de cailloux en fond de cale. Petit à petit, la quille, qui désigne la pièce de structure longitudinale à l'axe du bateau, en est venue à assumer aussi la fonction de lest, idéalement placée au fond du bateau. Les voiliers modernes à bulbe concentrent le poids au plus bas, en choisissant des matières denses comme la fonte ou le plomb. Plus le bateau est lourd et plus son centre de gravité est bas, plus il est stable.

La carène traditionnelle de Mariquita
La carène traditionnelle de Mariquita

Une histoire de compromis

L'architecture navale est l'art du compromis. En prenant en compte les exigences de vie à bord, de performance et de goût, il conviendra de doser entre stabilité de forme et stabilité de poids. Les "couloirs lestés", ces voiliers à quille profonde et très lestés conçus par les Britanniques pour la Coupe de l'America, s'opposaient aux "Coupes de champagne" américaines privilégiant la stabilité de forme à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle. En comprenant les bases de la stabilité, le plaisancier arbitrera plus facilement, à l'heure de choisir entre un petit tirant d'eau à fort déplacement ou un voilier léger à grand tirant d'eau, et les 50 nuances entre les deux !

Plus d'articles sur le thème
Réagir à cet article
Ajouter un commentaire...