Naviguer avec la voile gonflable Wisamo : une expérience déroutante

Nous avons pu tester la voile gonflable Wisamo automatisée par Michelin, avec l'aide de Michel Desjoyeaux. Si le voileux y perd quelques repères, certains plaisanciers pourraient être séduits. Fonctionnement, applications, on vous explique.

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Plus qu'une voile, un moteur à vent

Limiter les moteurs thermiques dans la plaisance, décarboner le transport maritime... Pour de multiples raisons, la voile et plus généralement la propulsion éolienne des bateaux ont de beaux jours devant elles, et concentre encore les efforts des inventeurs et développeurs. Parmi les dernières innovations, la nouvelle voile gonflable entièrement automatisée conçue par les équipes de Michelin, avec l'appui du skipper Michel Desjoyeaux, fait l'actualité. Nous avons eu l'occasion de tirer quelques bords, avec le prototype de cette voile Wisamo, installée sur le Sense 43 du marin.

Plutôt que d'utiliser le terme voile, Michel Desjoyeaux aime à qualifier sa solution de moteur à vent : "Le système est automatisé. Comme sur un moteur, on se contente d'appuyer sur un bouton pour le démarrer et de choisir la puissance voulue. Ensuite, il n'y a plus qu'à prendre la barre pour décider où l'on va."

Une voile gonflable sans écoute

En effet, même s'il s'agit d'un prototype que Michel Desjoyeaux et Michelin continuent de peaufiner, le système est entièrement automatique. À peine quitté le quai, notre skipper appuie sur un bouton de l'écran situé dans le cockpit, choisissant la pleine puissance, les conditions du jour étant modérées. Les 100 m2 de la voile se gonflent progressivement avant même d'être sortis de l'arrière-port de Concarneau. Le processus prend 5 minutes, à l'aide de 5 ventilateurs. La voile aux allures de Bibendum et son mât télescopique interne, hissés par des treuils électriques cachés dans la bôme, atteignent 16,56 mètres de haut.

La voile, montée sur un balestron, n'a pas d'écoute. C'est un moteur qui la fait tourner autour du mât pour régler l'incidence par rapport au vent, de manière automatique. Selon la puissance demandée et la force du vent, le logiciel de commande développé par Michelin, borde ou choque la voile, et, si cela est nécessaire, prend un ris sans même que l'équipage ne s'en préoccupe. Pour cela, le système s'appuie sur 3 anémomètres.

Sécurité et manœuvres

Une fois à la barre, le plaisancier habitué à un voilier classique a de quoi être perturbé. Nul besoin de régler les voiles, celles-ci s'ajustent selon qu'il lofe ou qu'il abatte. Vient le moment de tester l'empannage. Ici encore, les repères changent. Pas besoin de prévenir l'équipage d'éviter la bôme, celle-ci passe au-dessus de l'étrave, comme le gybe d'un véliplanchiste. Un élément de sécurité intéressant en croisière.

Autre intérêt de la voile Wisamo en matière de sécurité, elle peut être mise en drapeau quasi instantanément, quelle que soit l'allure du bateau. En cas d'incident ou d'homme à la mer, le skipper arrête son bateau sans manœuvre complexe.

La voile Wisamo n'est pas étanche, et les ventilateurs ont pour fonction de la maintenir sous pression, moyennant une petite consommation. Mais celle-ci dispense de solutions coûteuses pour l'étanchéité et garantit une sécurité supplémentaire en cas de déchirure. Michel Desjoyeaux en atteste : "Nous n'avons constaté une déchirure de plusieurs centimètres qu'à l'affalage au retour au port, car les ventilateurs maintenaient la voile gonflée."

Une solution concurrentielle dans le haut de gamme

Si la voile Wisamo a été développée en priorité pour des navires de commerce, dans le but d'offrir une solution de décarbonation entièrement automatisée, elle pourrait avoir des débouchés en plaisance. Le régatier passionné de réglage n'y trouvera pas son compte, mais elle pourrait séduire des sociétés de location souhaitant toucher des néophytes ne connaissant pas la voile, mais voulant naviguer sans moteur thermique, ou ceux-ci directement. Les plaisanciers âgés n'ayant plus les conditions physiques pour manœuvrer des mètres carrés de voilure pourraient aussi entrer dans la cible.

Fabriquée avec du tissu classique de gennaker, la voile, son mât et ses divers périphériques, atteignent pour un voilier comme le Sense 43 un budget équivalent à celui d'un voilier équipé des options haut de gamme, avec un mât en carbone, de belles voiles et de l'accastillage électrique. Les devis de masse sont comparables et les performances relevées sur le Sense 43 offrent des vitesses similaires, avec la Wisamo de 100 m2 et le plan de voilure classique de 86 m2.

Testée dans un vent modéré, la voile Wisamo a eu de quoi nous surprendre, notamment en se faisant oublier en entrant et en sortant du port. La verra-t-on fleurir sur les bateaux de plaisance haut de gamme ? Nul ne le sait, mais l'œil du plaisancier a sûrement intérêt à s'habituer à des gréements non conventionnels, Wisamo ou autre, qui ouvrent des pistes pour sortir du moteur thermique.

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Sense 43 La fiche technique
13.20 mLongueur hors-tout
4.28 mLargeur - Bau
1.65 mTirant d'eau mini
Voir la fiche technique du Sense 43
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Michel Rivière
Michel Rivière
Et qu'est ce qui fourni l'énergie nécessaire à maintenir la voile en fonctionnements ? l' hydro générateur ?
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