Quelle attitude adopter en multicoque de croisière face à un grain violent ?

Un ciel lourd de menace

Depuis plusieurs décennies, les multicoques ont conquis de nombreux plaisanciers. Leurs avantages sont multiples et indéniables. Mais connaître leurs différences face aux monocoques, permettra de bien réagir dans les conditions météo difficiles.

Stabilité : Les différences entre monocoques et multicoques

Les caractéristiques de stabilité attachées aux multicoques de croisières apportent, sans conteste, un agrément appréciable. Elles sont, dans une certaine mesure, le garant d'un surcroit de confort et de sécurité. Cependant, il ne faut surtout pas occulter le revers de la médaille, principalement en navigation par vent fort.

Les monocoques gitent. Au début, ça impressionne, bien sûr. Mais, le bon côté, c'est que ces bateaux, "saluant les risées ", préservent ainsi leurs gréements et leurs voiles. Ils "esquivent", réduisant de la sorte considérablement la surface exposée au vent. De cette manière, ils créent une sorte de régulation automatique face à des situations potentiellement dangereuses.

Australie: coup de vent annoncé, un monocoque rallie un abri
Australie: coup de vent annoncé, un monocoque rallie un abri

Les multicoques se comportent bien différemment. Une des configurations les plus délicates se rencontre dans le temps "à grains" ou dans les zones orageuses, vent faible et ciel chargé. L'amateur de propulsion vélique se trouve confronté à un difficile dilemme : faire voile ou solliciter la mécanique… Pour se déhaler en mode éolien, il doit sortir toute sa toile, car la brise est légère… C'est alors que survient le grain rageur, la survente vengeresse, la rafale félonne ! Aïe...

Alors, se manifestent clairement les différences de comportement entre monocoques et multicoques, liées à leurs stabilités respectives.

Un défaut d'anticipation se soldera par un gros coup de gite sur le monocoque "transporteur de plomb".

Au contraire, le skipper du multi s'exposera à des sanctions fort peu réjouissantes:

  • Soit il est léger et bien toilé, et il risque le chavirage…
  • Soit une surcharge pondérale affirmée lui aura conféré une rassurante "assise". Mais alors, ce sont le gréement et les voiles qui vont "encaisser" des efforts qui peuvent dépasser leur domaine d'utilisation préconisé. Et là, gare à la casse et au dématage !

Soulager son catamaran dans les grains

La bonne nouvelle, c'est qu'il existe des moyens efficaces pour calmer le jeu très rapidement.
Les multicoques modernes sont équipés, en majorité, de voilures privilégiant largement les grand-voiles. De plus, les voiles d'avant sont presque toujours montées sur enrouleur.
Dans ce contexte, dans une survente violente et subite, il faudra :

  1. Donner du mou dans l'écoute de grand-voile. Pas trop, pour éviter le faseyement destructeur, mais suffisamment pour bien "vriller" la voile, lui ôtant ainsi une grande quantité de sa force propulsive. Ce faisant, une partie seulement de la voile travaillera en écoulement laminaire, alors que, dans le haut, les filets d'air ayant une faible incidence génèreront une portance limitée et donc des efforts moindres.
  2. Rouler, en partie, la voile d'avant, sans l'occulter totalement, de manière à rester "manœuvrant". Il faut se dire : "à présent, je voudrais porter un tourmentin, ou un foc n° 2".
  3. Si l'allure est "arrivée" (plus de 110/120 degrés du vent réel), et qu'on a de l'eau à courir, on peut abattre d'une trentaine de degrés. Le temps de laisser passer le grain et de bien "sentir" l'ambiance. Attention, toutefois, à ne pas s'approcher du vent arrière. Cette allure peut-être très dangereuse à cause du risque d'empannage involontaire. Aussi, on s'appliquera à ne pas dépasser 150 degrés du vent réel.
Australie: coup de vent annoncé - ralliement vers un abri (DR : Nicolas Poitou)
Australie: coup de vent annoncé - ralliement vers un abri (DR : Nicolas Poitou)

Les erreurs à éviter

Surpris par une survente rageuse, certains équipages ont le réflexe de lofer en grand et de lancer leurs moteurs… Cette attitude a le dramatique inconvénient de faire faseyer simultanément la grand-voile et la voile d'avant. Il s'ensuit une impression de "fin du monde" qui a un effet dévastateur sur les âmes sensibles… De plus, c'est un bon moyen pour créer des sacs de nœuds un peu partout : dans les écoutes, balancine, bosses de ris, etc.

Naviguer à la voile ou au moteur selon les cas

Face à chaque type de situation délicate et stressante, il existe une bonne attitude à adopter. Il faut s'y préparer lorsque le temps est encore maniable, puis la pratiquer à bon escient, quand ça "chauffe" un peu.

Et enfin, il n'y a pas de honte à utiliser la mécanique. Avec une météo très incertaine, une des meilleures dispositions est de réduire prématurément et d'avancer au moteur dans les "molles". Quand ça souffle, on stoppe les machines et on peaufine les réglages.

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