Yvan Bourgnon pris au piège entre les glaces

Yvan Bourgnon © Pierre Guyot et Fred Pergola

Reparti le 17 août 2017 de Taloyoak - au Canada - où il effectuait un stand-by de près de 10 jours pour attendre que s'ouvre un passage dans les glaces — Yvan Bourgnon rencontre désormais des conditions extrêmement difficiles, voir même inquiétante et rencontre un niveau de stress jamais atteint.

Se mettre à l'abri, la priorité

Le 17 août 2017, Yvan Bourgnon repartait de son mouillage à Taloyoak au Canada pour terminer son Record du Passage Nord-Ouest. 1300 milles à parcourir pour rejoindre Nuuk au Groenland, et certainement les plus difficiles de son parcours. Une difficulté à laquelle il ne s'attendait pas comme il l'a confié lors de son direct, le 24 août dernier.

Alors qu'il ne lui reste qu'une dizaine de milles pour passer la plus grosse zone glacée, Yvan s'est retrouvé bloqué par les glaces. Il a donc dû rebrousser chemin et trouver refuge dans une petite baie. Après une 2e tentative, deux jours après, qui s'est elle aussi révélée infructueuse, il a de nouveau voulu faire marche arrière, mais s'est retrouvé coincé dans ce sens aussi, les glaces ayant dérivé. Il s'est alors retrouvé à mouiller à 3 reprises, mais dans des conditions difficiles, avec seulement 100 m entre lui et la banquise.

Lors de sa vacation, on sentait le stress dans la voix du marin qui rencontre des conditions extrêmement difficiles. En effet, des vents de nord forts sont annoncés ce dimanche 27 août obligeant le marin à se protéger. Et il ne savait pas s'il arriverait à retourner s'abriter dans la baie. Car d'autres situations s'offrent à lui, mais aucune n'est envisageable :

  • S'échouer sur la plage, mais il lui serait alors impossible de remettre à l'eau son bateau
  • Se mettre sur la glace, au risque d'abimer son bateau.

"Ce sont des sources de stress inimaginables et je ne m'attendais pas à ça. C'est vraiment dur pour les nerfs" explique-t-il.

Nous avons appris aujourd'hui, ce vendredi 25 août, que Yvan avait réussi à rejoindre la baie. Mais il est désormais bloqué et ne peut pas repartir pour l'instant. C'était d'ailleurs le cas lors de son premier mouillage dans cette baie, comme il l'avait expliqué auparavant. Le vent du nord avait complètement fermé la baie et pendant quelques heures, le marin ne pouvait plus sortir. Même si les mouillages ne sont pas reposants, il n'est pas en danger, comme il peut l'être au milieu des glaces.

"Quand je me suis réveillé, c'était déjà trop tard ! Les glaces bloquent la sortie de la baie, et je suis totalement impuissant devant cette situation. Je n'ai pas les cartes en main. Si le vent passe au sud, il dégagera peut-être la situation. S'il continue à souffler de nord et qu'il se renforce, les masses de glace vont dériver sur moi et écraser le bateau à la côte" a confié l'aventurier.

Les 7 milles les plus difficiles à parcourir de sa carrière

"On ne peut pas dire que je n'ai pas essayé. Je mets toute la meilleure volonté du monde et je prends des risques énormes. Je suis à deux doigts de me fracasser sur un glaçon. Les tempêtes, la précarité, le froid me semblent tellement anodins par rapport au stress des glaçons. La glace bouge très vite et c'est angoissant quand je m'engage dans un estuaire je ne sais pas à quoi m'attendre. J'ai un stress permanent de m'échouer, car la côte est très proche puisque je mouille avec 3 ou 4 m de profondeur. Et même au mouillage, toutes les demies-heure, j'entends un glaçon qui vient taper sur la coque et qui pourrait couper mon mouillage" expliquait Yvan lors de sa vacation.

En contact avec d'autres bateaux, il a confié qu'ils étaient encore 5 (dont lui) à vouloir passer de l'autre côté, vers les îles Tasmania. "Pour l'instant c'est rassurant, mais quand il n'y aura plus un seul voilier sur zone, je n'aurai plus de solution en cas de détresse, ce sera un stress supplémentaire" indique le marin.

Alors qu'il a parcouru plus de 2000 milles, Yvan est désormais bloqué pour parcourir les 7 milles qui le coupent des îles Tasmania. "Ce n'est rien par rapport à ce que j'ai parcouru et c'est vraiment dur psychologiquement. Je n'ai jamais été atteint comme ça tout au long de ma carrière sportive. J'ai le stress de sentir que je suis à deux doigts de me cracher. C'est bien pour ça qu'aucun bateau comme le mien n'a réussi à passer. J'espère que je n'ai pas mis la barre trop haute" explique l'aventurier.

Crédits photo : Yvan Bourgnon
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